Nouvelle stratégie américaine au Proche-Orient
Au Proche-Orient, le processus de paix semble une nouvelle fois s’enliser. Certains craignent qu’il ne laisse la place à un processus de guerre, en raison des transformations constatées depuis deux ans sur la scène géostratégique. Par François Nordmann
Au Proche-Orient, le processus de paix semble une nouvelle fois s’enliser. Certains craignent qu’il ne laisse la place à un processus de guerre, en raison des transformations constatées depuis deux ans sur la scène géostratégique. Le réarmement du Hamas à Gaza et du Hezbollah au Liban, qui devait être contrôlé sinon empêché par l’ONU, est un facteur latent de tension; la réconciliation du gouvernement Hariri du Liban avec la Syrie, le rôle croissant de l’Iran et la politique étrangère émancipée de la Turquie, enfin la poursuite de la colonisation des territoires occupés par Israël rendent la situation plus fragile et plus complexe.
La politique américaine a subi un revers: après deux ans d’efforts, le président Obama a dû reconnaître qu’il ne valait pas la peine de s’arc-bouter sur la recherche d’un accord partiel, portant sur l’arrêt des constructions dans les Territoires occupés. Le premier moratoire de dix mois, péniblement arraché au gouvernement Netanyahou, n’a guère permis de faire progresser les pourparlers directs entre Israéliens et Palestiniens; la négociation d’un second moratoire de trois mois avait un coût disproportionné pour un résultat incertain dans le climat de méfiance actuel. La Maison-Blanche a estimé que le jeu n’en valait pas la chandelle et elle a renoncé à cette approche.
Elle privilégie désormais une solution d’ensemble, comportant tous les éléments du problème, frontières, territoires et sécurité, réfugiés, distribution de l’eau et statut de Jérusalem, dans l’idée que des concessions de part et d’autre sur chacun de ces points s’équilibreraient et déboucheraient sur la création de l’Etat palestinien et l’instauration de la paix entre Israël et le monde arabe qui sont ses objectifs.
Il serait donc erroné de croire que l’Amérique, dont le prestige a pâti dans cet épisode, baisserait maintenant les bras. Au contraire: la secrétaire d’Etat Hillary Clinton a défini le 10 décembre dernier une stratégie pour les pourparlers indirects auxquels elle entend conférer une nouvelle vigueur, et qui doivent reprendre cette semaine à Washington, à moins que le nouveau chantier ouvert à l’hôtel Shepherd de Jérusalem-Est ne les retarde.
En effet, pour les Palestiniens, l’arrêt de la colonisation dans les Territoires occupés demeure un préalable à toute négociation, et un mouvement se dessine pour amener le Conseil de sécurité de l’ONU à réaffirmer le principe de l’illégalité de l’occupation israélienne. Cette démarche peut compliquer la relance de la politique américaine, mais elle peut aussi la servir…
Après avoir souligné le soutien des Etats-Unis à l’Etat juif et leur attachement à la sécurité d’Israël, Hillary Clinton a rappelé que la réalisation des aspirations légitimes des Palestiniens était de l’intérêt non seulement de ces derniers, mais aussi des Etats-Unis et d’Israël. Quels que soient les progrès de l’Autorité palestinienne au plan économique et institutionnel, il n’y a pas de substitut à une solution politique, la création de l’Etat palestinien est une urgente nécessité. La secrétaire d’Etat évoque les dangers qui pèsent sur la région – l’Iran nucléaire, les fusées de longue portée dont disposent les organisations terroristes. Mais, dit-elle, le refus de faire droit aux attentes palestiniennes menace tout autant la sécurité d’Israël.
Seules les parties peuvent se mettre d’accord: même si Washington en avait les moyens, les Etats-Unis ne sauraient leur imposer une solution qui serait vouée à l’échec, faute de reposer sur le consentement des intéressés. Mais les Etats-Unis veulent pousser les deux interlocuteurs à leur soumettre des propositions détaillées sur tous les points à régler, et ils n’hésiteront pas ensuite à formuler des compromis possibles et à faire valoir toute leur influence pour les faire adopter.
Mettre la définition des frontières en tête de chapitre est un pas en direction des thèses palestiniennes, car on touche à la fois au problème de la colonisation et à celui de la sécurité. Sur Jérusalem, Hillary Clinton parle d’un accord qui garantisse les intérêts religieux de tous les peuples du monde, ce qui pourrait indiquer une préférence pour doter la ville, ou du moins les Lieux saints, d’un statut international.
Il reste à voir si Hillary Clinton voudra mettre en œuvre elle-même son projet ou si elle reçoit les pouvoirs nécessaires à cet effet – ce qui signifierait que le président Obama et ses conseillers se situeraient en retrait d’un dossier dans lequel ils se sont brûlé les doigts sans que cela n’entame leur détermination. Et aussi comment elle compte venir à bout des réticences et des oppositions qu’il lui faudra surmonter dans ce cas. Mais les meilleurs résultats de la longue histoire du processus de paix n’ont-ils pas été obtenus par ses prédécesseurs, tels Henry Kissinger et James Baker, qui se sont beaucoup engagés personnellement dans ce dossier, quitte à devoir taper sur la table et à multiplier les voyages et de harassantes sessions de travail?
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