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Τρίτη 11 Ιανουαρίου 2011

Le potentiel économique du Kurdistan irakien aiguise l'appétit de la Turquie
12.08.10

Aéroport, BTP, antenne d'université : Ankara pousse sa politique du « bon voisinage » avec Erbil
'est l'une des pistes d'atterrissage les plus longues du monde, avec ses 4,8 km. Deux avions peuvent atterrir en même temps, face à face, sans se rencontrer », montre Cetin Dayioglu, en écrasant la pédale d'accélérateur de son 4 × 4 sur le tarmac lisse comme un billard. Le directeur de la compagnie turque de travaux publics Mak-Yol, responsable de la construction du nouvel aéroport d'Erbil, la capitale du Kurdistan d'Irak, fait visiter son joyau : les installations « les plus modernes du Moyen-Orient », un terminal capable d'accueillir 2,5 millions de passagers par an. « Au mieux, il en accueillera un million, mais ici on aime faire les choses en grand », sourit le patron turc.
Repoussée à plusieurs reprises depuis plus d'un an, l'inauguration de ce nouvel aéroport international, symbole de la nouvelle entente cordiale entre la Turquie et la région kurde d'Irak, devrait avoir lieu en septembre ; en présence du premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, espère le gouvernement kurde d'Erbil.
Longtemps entravés par des relations politiques délicates, les échanges commerciaux entre Ankara et Erbil connaissent des taux de croissance record. Près de 60 % des 1 200 sociétés étrangères installées au Kurdistan irakien sont turques.
Signe de cet afflux, la compagnie nationale Turkish Airlines va ouvrir des liaisons quotidiennes avec Istanbul et Ankara. Au poste frontière terrestre de Habur, le nombre de douaniers va être triplé pour accélérer le transit des camions, qui font entrer chaque jour des milliers de tonnes de matériaux de construction et de biens de consommation. « Les compagnies turques ont compris avant les autres que la zone est sûre et pleine d'opportunités : centrales, routes, raffineries, pipelines, tout est à construire, et il y a de l'argent », précise M. Dayioglu, dont l'entreprise vient également d'achever la rénovation de la route d'Erbil à Kirkouk, un noeud pétrolier stratégique.
« Nos hommes d'affaires sont plus intrépides que les vôtres », s'amuse Aydin Selcen, le consul général de Turquie pour la région kurde, fraîchement nommé. « Quand le ministre des affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, est venu à Erbil en octobre 2009, il a déclaré que la frontière entre la Turquie et l'Irak devait être rendue obsolète par l'intégration économique des deux pays », poursuit le diplomate.
En juin, le ministre turc du commerce extérieur, Zafer Caglayan, s'est rendu à Erbil avec 200 hommes d'affaires. L'Irak est déjà le quatrième partenaire commercial, avec 7,5 milliards d'euros, dont 4,5 milliards d'échanges avec la seule région kurde. Trois banques, six compagnies pétrolières s'apprêtent à investir. Une zone franche est en projet, à la frontière. Les entreprises de BTP bâtissent à la chaîne des lotissements, des hôtels, des centres commerciaux remplis de produits turcs, et plus de 80 % des matériaux sont acheminés de Turquie. Sur des kilomètres les camions de ciment attendent aux postes de douane.
Pourtant, la simple existence d'une représentation officielle turque à Erbil aurait paru impossible il y a moins de trois ans. Pour Ankara, la présence de centaines de rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans les montagnes du nord de l'Irak et la coopération jugée « insuffisante » d'Erbil faisaient encore obstacle.
Mais la diplomatie de bon voisinage du ministre des affaires étrangères a accéléré le rapprochement. La visite en Turquie du président de la région autonome kurde, Massoud Barzani, en juin, a confirmé le chemin parcouru. « Il y a une coopération sur les dossiers de sécurité avec les Etats-Unis, l'Irak et le gouvernement régional kurde », confirme M. Selcen. L'armée turque bombarde régulièrement les repaires du PKK au-delà de sa frontière. « De plus, nous avons besoin du gaz et du pétrole irakiens pour alimenter le développement rapide de notre pays », poursuit-il. Les Kurdes d'Irak, qui veulent exporter leurs propres ressources vers la Turquie, prévoient de multiplier leur production par dix d'ici cinq ans.
Pour reconquérir cette ancienne province de l'Empire ottoman, les Turcs misent sur leurs hommes d'affaires et investissent dans l'éducation, réactivant de solides réseaux. Dix-neuf écoles et une université ont été ouvertes dans la région par la communauté de Fethullah Gülen, un imam turc à la tête d'un réseau d'écoles dans le monde entier. L'université Bilkent d'Ankara, fondée par Ihsan Dogramaci, un médecin et puissant homme d'affaires turc décédé en février, originaire de la communauté turkmène d'Erbil, va également inaugurer une antenne à la rentrée. Le géant du bâtiment appartenant au même groupe familial, Tepe, reconstruit les universités de Suleymanieh et d'Erbil.
La Turquie voisine « est une porte ouverte sur l'Ouest et la civilisation occidentale », estime Sinan Chalabi, le ministre du commerce et de l'industrie de la région kurde. Nommé à ce poste clé par Massoud Barzani, M. Chalabi est un Turkmène lié à la Turquie et à l'influente famille Dogramaci. « Un Turc pour parler aux Turcs », commente-t-on à Erbil.
Ankara mène « une diplomatie d'influence commerciale envahissante, analyse un expert de la région. Ils sont en train de construire un Irak à leur convenance. » L'appétit turc ne se limite d'ailleurs pas au Nord. « Nous voulons être présents partout, coopérer avec tout le monde », assène le consul turc d'Erbil. A Mossoul, à Bagdad, où les négociations pour la formation d'un nouveau gouvernement sont attentivement suivies, mais aussi à Bassora, dans le Sud chiite, où elle a ouvert un consulat, la Turquie s'est lancée à la conquête de nouveaux marchés.
Guillaume Perrier

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