Le second exode des Albanais de Grèce
Ils avaient fui la misère en s’installant en Grèce. Aujourd’hui, ils font le chemin inverse.
Ils rentrent chez eux. Pour une bonne raison : une crise économique que les autorités grecques ne peuvent plus juguler. Les protestations massives, puis les grèves générales ont fini de les convaincre.
Ksero M., 45 ans, est rentré en Albanie dès le mois de février. Son épouse hésitait, leur fils étant scolarisé et bien intégré dans ce pays d’accueil. Et puis restait l’espoir de voir les choses changer. Mais la situation n’a cessé de se dégrader et Ksero a tranché : tout le monde rentre à la maison. A son grand étonnement, son fils, adolescent, l’a soutenu dans cette décision. De retour chez eux, Ksero a créé une petite entreprise de vente de matériaux de construction à Tirana. C’est sa femme, comptable, qui s’occupe de la partie administrative, essayant de se réadapter aux us et coutumes locales. La Grèce “ne fait plus partie de notre avenir”, affirme Ksero, diplômé en histoire de l’art que rien ne prédisposait à travailler dans le bâtiment. Mais la vie et surtout l’émigration en ont décidé autrement. Partis en Grèce en 2000, ces deux intellectuels ont travaillé, comme bon nombre de leurs concitoyens, comme maçons ou agents d’entretien. Parce que cela payait bien : à eux deux, ils pouvaient assurer jusqu’à 2 000 euros par mois. Une petite fortune pour des Albanais. Mais tout cela est fini. “Nous sommes partis avant que la situation ne dégénère complètement, et nous avons eu raison, poursuit Ksero. Ton pays reste ton pays ; à part ceux qui se sont embourbés dans des crédits inutiles, tous les Albanais de Grèce que je connais songent à rentrer”, affirme-t-il.
Raimond D., 48 ans, avait émigré en Grèce en 1995 et trouvé un emploi de chauffeur routier qui lui assurait un bon revenu. Jusqu’à ce qu’un accident le ramène à son ancienne profession, garagiste. Tout allait bien là aussi, sa femme travaillait comme dame de compagnie pour une personne âgée qui vivait seule et qui, d’une grande générosité, la logeait gratuitement avec ses trois enfants, tous scolarisés dans des écoles grecques. Mais, à sa mort, la femme de Raimond n’a plus trouvé que des petits boulots. Le salaire de Raimond ne suffisait plus à couvrir les besoins de la famille. D’autant plus qu’à la faveur de la crise économique son patron a décidé de réduire le rythme de travail et songe même à fermer son atelier. Raimond et son épouse ont alors décidé de retourner à Fier (dans le sud de l’Albanie), leur ville natale, où ils envisagent d’ouvrir un garage “à l’européenne”. Nous rencontrons Raimond, venu en prospecteur, alors que ses enfants et son épouse sont encore en Grèce afin de préparer cette seconde émigration. “J’ai fini par suffoquer en Grèce, j’espère ouvrir mon entreprise ici et être mon propre patron”, dit-il. L’un de ses collègues tempère son optimisme : “Tu as fui la crise grecque, OK. Mais ici il faut survivre”, lui rappelle-t-il. Raimond en est bien conscient.
Ils sont nombreux, ces Albanais qui ont franchi le pas ou envisagent sérieusement de revenir dans leur patrie. Pour d’autres, la question ne se pose pas, soit parce qu’ils sont intégrés et ont réussi à s’assurer une très bonne situation, soit parce qu’ils sont tenus par des crédits à rembourser. Parmi ceux qui sont revenus, très peu pensent repartir en Grèce un jour. Les mesures d’austérité prises par le gouvernement grec, les débats houleux au sein du Parlement et, plus généralement, l’atmosphère de radicalisation et d’intolérance dans la société ont confirmé leur sentiment que la Grèce n’est plus le pays de cocagne dont ils avaient rêvé.
Les émigrants qui nous ont confié leur témoignage se rejoignent sur un point : ils veulent désormais se consacrer à leur nouvelle vie en Albanie et ont refermé le chapitre grec de leur vie, du moins pour le moment. L’Union européenne et le Fonds monétaire international ont accepté de sauver financièrement la Grèce. Le plan anticrise prévoit une réduction des dépenses de 30 milliards d’euros et une baisse des salaires et des aides sociales, ainsi qu’une augmentation de la TVA pour certains produits du quotidien. Les Albanais qui ont préféré quitter la Grèce ne sont pas dupes. Ils savent que la situation en Albanie n’est pas forcément plus mirobolante. “Nous passons de Charybde en Scylla”, ironise Ksero. Mais, au moins, ils sont chez eux.
Ksero M., 45 ans, est rentré en Albanie dès le mois de février. Son épouse hésitait, leur fils étant scolarisé et bien intégré dans ce pays d’accueil. Et puis restait l’espoir de voir les choses changer. Mais la situation n’a cessé de se dégrader et Ksero a tranché : tout le monde rentre à la maison. A son grand étonnement, son fils, adolescent, l’a soutenu dans cette décision. De retour chez eux, Ksero a créé une petite entreprise de vente de matériaux de construction à Tirana. C’est sa femme, comptable, qui s’occupe de la partie administrative, essayant de se réadapter aux us et coutumes locales. La Grèce “ne fait plus partie de notre avenir”, affirme Ksero, diplômé en histoire de l’art que rien ne prédisposait à travailler dans le bâtiment. Mais la vie et surtout l’émigration en ont décidé autrement. Partis en Grèce en 2000, ces deux intellectuels ont travaillé, comme bon nombre de leurs concitoyens, comme maçons ou agents d’entretien. Parce que cela payait bien : à eux deux, ils pouvaient assurer jusqu’à 2 000 euros par mois. Une petite fortune pour des Albanais. Mais tout cela est fini. “Nous sommes partis avant que la situation ne dégénère complètement, et nous avons eu raison, poursuit Ksero. Ton pays reste ton pays ; à part ceux qui se sont embourbés dans des crédits inutiles, tous les Albanais de Grèce que je connais songent à rentrer”, affirme-t-il.
Raimond D., 48 ans, avait émigré en Grèce en 1995 et trouvé un emploi de chauffeur routier qui lui assurait un bon revenu. Jusqu’à ce qu’un accident le ramène à son ancienne profession, garagiste. Tout allait bien là aussi, sa femme travaillait comme dame de compagnie pour une personne âgée qui vivait seule et qui, d’une grande générosité, la logeait gratuitement avec ses trois enfants, tous scolarisés dans des écoles grecques. Mais, à sa mort, la femme de Raimond n’a plus trouvé que des petits boulots. Le salaire de Raimond ne suffisait plus à couvrir les besoins de la famille. D’autant plus qu’à la faveur de la crise économique son patron a décidé de réduire le rythme de travail et songe même à fermer son atelier. Raimond et son épouse ont alors décidé de retourner à Fier (dans le sud de l’Albanie), leur ville natale, où ils envisagent d’ouvrir un garage “à l’européenne”. Nous rencontrons Raimond, venu en prospecteur, alors que ses enfants et son épouse sont encore en Grèce afin de préparer cette seconde émigration. “J’ai fini par suffoquer en Grèce, j’espère ouvrir mon entreprise ici et être mon propre patron”, dit-il. L’un de ses collègues tempère son optimisme : “Tu as fui la crise grecque, OK. Mais ici il faut survivre”, lui rappelle-t-il. Raimond en est bien conscient.
Ils sont nombreux, ces Albanais qui ont franchi le pas ou envisagent sérieusement de revenir dans leur patrie. Pour d’autres, la question ne se pose pas, soit parce qu’ils sont intégrés et ont réussi à s’assurer une très bonne situation, soit parce qu’ils sont tenus par des crédits à rembourser. Parmi ceux qui sont revenus, très peu pensent repartir en Grèce un jour. Les mesures d’austérité prises par le gouvernement grec, les débats houleux au sein du Parlement et, plus généralement, l’atmosphère de radicalisation et d’intolérance dans la société ont confirmé leur sentiment que la Grèce n’est plus le pays de cocagne dont ils avaient rêvé.
Les émigrants qui nous ont confié leur témoignage se rejoignent sur un point : ils veulent désormais se consacrer à leur nouvelle vie en Albanie et ont refermé le chapitre grec de leur vie, du moins pour le moment. L’Union européenne et le Fonds monétaire international ont accepté de sauver financièrement la Grèce. Le plan anticrise prévoit une réduction des dépenses de 30 milliards d’euros et une baisse des salaires et des aides sociales, ainsi qu’une augmentation de la TVA pour certains produits du quotidien. Les Albanais qui ont préféré quitter la Grèce ne sont pas dupes. Ils savent que la situation en Albanie n’est pas forcément plus mirobolante. “Nous passons de Charybde en Scylla”, ironise Ksero. Mais, au moins, ils sont chez eux.
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